Cadre pédagogique
Toute personne ayant été à l’école peut aisément s’imaginer nos cours (leur contenu, les méthodes utilisées par les professeurs, les relations qui s’établissent entre élèves et enseignants, etc.).
Nos formateurs, au quotidien, dispensent leurs cours. Ils s’attachent à enseigner des contenus, à utiliser des méthodologies identiques à ce qui est proposé aux adultes hors prison. Il s’agit principalement de cours généraux ne dépassant pas le niveau du secondaire inférieur, en fonction du niveau scolaire de la majorité des détenu-es.
[+] voir aussi Activités > les bénéficiaires
Nos projets pédagogiques sont, évidemment, similaires à ceux de l’enseignement classique.
Bien sûr, le fait que ces cours prennent place dans l’univers carcéral n’est pas anodin. La vie au quotidien des étudiants est marquée par l’enfermement. Tout le challenge des formateurs est d’orienter les cours vers d’autres horizons, tout en prenant en compte les réalités vécues par leurs élèves. Et cela, sans se laisser démonter par les obstacles multiples qui peuvent se dresser (grève, absentéisme, transfert, ...) et l’ambiance peu favorable à l’étude qui prévaut en prison.
Nous tentons donc, dans toutes les prisons où nous travaillons, de proposer une offre pédagogique variée. En effet, nombreux sont les détenus qui ne sont pas prêts à s’investir dans un module de cours structurés, aux objectifs scolaires précis.
Les activités culturelles, les cours à la carte1, les modules courts2 aux objectifs plus centrés sur l’émergence des motivations et des projets individuels sont autant d’activités pédagogiques permettant de mener leurs participants vers des formations plus qualifiantes par la suite.
Nos programmes ne sont pas les mêmes d’une prison à l’autre. Au fil du temps, ils ont été adaptés aux réalités locales.
[+] pour plus de détails, voir Le cadre > les prisons
On y retrouve :
- des séances d’information et d’orientation vers les cours & modules proposées, ainsi que vers les autres activités (culturelles et autres) disponibles dans la prison ;
- des cours d’alphabétisation, de français, d’anglais, de néerlandais, de calcul, de mathématiques, d’histoire, de géographie, de sciences, de culture générale, d’éducation sociale, d’informatique et de gestion ;
- des cours généraux en lien avec certaines formations professionnelles de la Promotion sociale ;
- les cours préparant à l’examen pour l’obtention du CEB ;
- le suivi pédagogique individualisé que nous assurons auprès de nos élèves et de certains étudiants suivant les cours de Promotion Sociale et de l’Enseignement à distance.
Les objectifs sont variés, et vont des plus généraux aux plus particuliers :
- émancipation sociale ;
- citoyenneté ;
- développement personnel ;
- acquisition de connaissances et de compétences scolaires ;
- acquisition de connaissances et de compétences intellectuelles (apprendre à apprendre) ;
- acquisition de connaissances et de compétences affectives (apprendre à se connaître, à comprendre ses trajectoires de vie) et sociales (apprendre à connaître ses pairs, d’autres groupes sociaux, d’autres trajectoires, apprendre à communiquer de manière pacifiée, réflexion sur les valeurs).
Les méthodes utilisées sont nombreuses, adaptatives et évolutives :
- pédagogie de la réussite ;
- pédagogie du projet ;
- pédagogie participative ;
- échanges « par-delà les murs »3 ;
- échange des connaissances entre élèves ;
- pédagogie s’appuyant sur les acquis existants et la valorisation de chaque progrès, si minime soit-il, …
Tout cela a conduit (et conduira encore !) à de grands moments et à quelques belles réussites : les examens et les cérémonies de remise de diplômes et d’attestations, les présentations orales et écrites de travaux par des étudiants qui ne s’en croyaient pas capables, des groupes d’élèves qui manifestent un plaisir certain à passer du temps ensemble, à travailler, des élèves qui montrent une évolution personnelle positive, des étudiants libérés devenus carreleurs, soudeurs, cuisiniers, employés, retraités, bénévoles, pères ou mères de famille, …
Un cadre particulier...
Le fonctionnement inhérent des prisons (maisons d’arrêt ou prisons de peine) posent quelques problèmes récurrents qui peuvent entraver la mise sur pied de formations et le suivi de l’apprentissage.
Voici les principales difficultés auxquelles nous sommes régulièrement confrontées :
- manque de locaux et de matériel adaptés ;
- suspension des cours (de quelques jours à quelques semaines) suite aux mouvements syndicaux des surveillants (grève, effectif trop réduit des équipes de surveillance) ;
- transfert des détenus d’une prison à l’autre, pour des raisons liées au surpeuplement, à la sécurité ou aux nécessités de l’instruction judiciaire : des détenus sont donc régulièrement déplacés en cours d’apprentissage ;
- punitions qui privent certains détenus d’activités collectives et donc de cours ;
- détenus pas appelés aux cours, ou appelés tardivement ;
- le travail, décrété prioritaire par certains directeurs de prison, qui mobilise les détenus. De plus, au sein des établissements pénitentiaires, tous ne se sentent pas encore également partenaires des projets de formations. Ils ne sont pas hostiles, plutôt indifférents : ils nous tolèrent, mais considèrent les formations comme secondaires par rapport à la sécurité ou au travail.
L’enseignement en prison n’a donc pas toujours la place qu’il mérite, ou plutôt qu’un simple regard sur le niveau scolaire moyen des détenus devrait lui assigner !
[+] voir à ce sujet Activités > les bénéficiaires
1 inscriptions permanentes, possibilité de choisir un ou plusieurs cours, à raison d’une à quelques heures hebdomadaires. [↑]
2 plus structurés, durée déterminée, plusieurs cours différents, de 6 à 21 heures hebdomadaires. [↑]
3 grâce à des invités aux cours : avocats, assistants sociaux, psychologues, médecins, médiateurs, acteurs, journalistes, aumôniers, reines, ministres, chef indien québécois, historien spécialiste du Moyen Age, inspecteurs de l’enseignement, directeurs d’école, policiers, assureurs,… [↑]